
Publié le : dimanche 12 juin 2005
Rubrique historique du dimanche
Robert Siredey, ancien chef du groupe FFI Frac du Laignois
Le groupe Frac. Robert Siredey est le deuxième à partir
de la gauche (photo SDR)
Une triste nouvelle nous est parvenue de l'Yonne : celle de la mort
de Robert Siredey. Plus connu sous son pseudonyme de Frac - qui remplaça
la première dénomination du maquis qu'il dirigea (Mangin)
-, Robert était devenu clandestin en 1943 par refus du Service
du travail obligatoire en Allemagne.
Originaire du Doubs, il gagne le Châtillonnais où vit
un de ses oncles. Ce dernier l'aiguille dans la région de Laignes,
sur la ferme isolée d'Omer Osaer, qui l'emploie clandestinement
comme commis. D'autres réfractaires sont hébergés
dans des fermes voisines.
Une entrée en Résistance précoce
Fin 1943, Robert tente de rejoindre la Résistance, plus précisément
le groupe Tabou de Julien Dubois (en
fait Julien BON).
Mais celui-ci vient de subir une attaque meurtrière, et il faut
trouver une autre filière.
C'est le maire de Channay, M. Gaultier, qui y pourvoira discrètement.
Robert Siredey et un compagnon rejoignent alors un petit groupe d'hommes
encore peu organisé. Dirigés par Pierre Thomas, ils sont
ravitaillés par la population et recrutent peu à peu.
Il faut, par précaution, souvent changer d'emplacement.
Blessé accidentellement par une balle de mitraillette, le chef
Thomas ne peut être évacué sur l'hôpital à cause
de patrouilles ennemies et meurt au camp. Les hommes lui élisent
un successeur en la personne de Georges Chancel (alias Big) qui prend
Robert Siredey pour second.
Le cantonnement, mieux organisé, compte onze volontaires au
1er janvier 1944. Ils aident aux opérations de parachutages,
reçoivent armes et explosifs qui servent à de multiples
sabotages de la voie ferrée. Début juin, trente-trois
maquisards ont rejoint le groupe. Hélas, le chef Chancel est à son
tour tué peu après au cours d'une mission dans l'Yonne.
A la tête du groupe FFI Mangin
Robert Siredey le remplace et va donner toute la mesure de ses qualités
d'organisateur. Sa tête mise à prix, il se rend chez l'opticien
Badoz de Laignes qui lui prépare des lunettes à verres
neutres pour modifier l'allure de son visage.
Avec son armement parachuté, notamment des fusils-mitrailleurs
anglais Bren et des bazookas, le groupe Frac va devenir un des plus
actifs du Châtillonnais, multipliant embuscades et sabotages.
Il installe des abattis d'arbres pour retarder la retraite ennemie.
Même les gendarmes de Laignes le rejoignent.
Le 24 août, l'état-major FFI donne à Robert Siredey
ordre de conduire son groupe à Châtillon. Mais l'action
est prématurée, et le groupe Frac se heurte à un
fort convoi. S'en suit un combat violent dans les rues de Laignes ;
les FFI, heureusement sans perte, doivent abandonner leurs véhicules
qui seront détruits. Robert a parfaitement coordonné la
retraite.
Après la libération de Laignes, le groupe se rend en
renfort aux combats du pont de Maisey. Puis il est transféré à Dijon
où une partie de ses hommes s'engagent dans la Première
armée pour la fin de la guerre. Robert Siredey est de ceux-là.
Un homme simple et modeste
La paix revenue, Robert reprend ses activités professionnelles
comme s'il les avait quittées la veille ; il ne parlera plus
de Résistance avant des dizaines d'années, jusqu'à ce
qu'il accepte de dresser l'historique du groupe Mangin-Frac.
Robert était de ces êtres d'une modestie et d'une gentillesse
rares. Il avait tenu à rendre hommage à tous les humbles
qui aidèrent son maquis : « Tous les civils qui ont aidé,
hébergé, ravitaillé, présents la nuit aux
parachutages pour garder et baliser le terrain, cacher les containers
avant l'aube, servir d'agents de liaison et de renseignements, tous
n'ont pas été cités dans l'effectif du groupe
Mangin et n'ont même pas eu droit à un merci. Pourtant,
sans eux, il nous était impossible de tenir et ils risquaient
encore plus que nous ».
Ces préoccupations permettent d'appréhender la personnalité de
celui qui, dans le Laignois, restera à jamais Frac.
Gilles HENNEQUIN

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